La Libre - Vincent Blondel (UCLouvain) dévoile "Circle U", le nouveau projet de la rentrée : “Nos étudiants auront accès à toute l’offre de 7 universités européennes” Monique Baus

Anonyme • 16 septembre 2019
Actualité dans le groupe [ARES] Personnel

Publié le lundi 16 septembre 2019 à 06h30 - Mis à jour le lundi 16 septembre 2019 à 12h33

Le recteur Vincent Blondel parle d’une révolution comparable au programme Erasmus en termes de mobilité.  

À part la nomination d’un nouveau gouvernement et, en particulier, celle d’une nouvelle ministre de l’Enseignement supérieur, en quoi cette rentrée-ci est-elle, pour l’UCLouvain, différente des autres ?

Un vaste projet va se concrétiser pour nous cette année. Je vous annonce la création de l’université européenne "Circle U." dont fait partie l’UCLouvain et dont nous venons de dévoiler le beau logo. Vous souvenez-vous des changements en termes d’ouverture au monde qui furent apportés il y a trente ans par le programme Erasmus (mobilité étudiante, NdlR) puis quinze ans plus tard par Bologne (transferts de crédits, NdlR) ? Nous sommes à l’aube d’une nouvelle révolution comparable avec un changement complet de paradigme. À l’UCLouvain, nous nous inscrivons dans une alliance de sept universités européennes.

Ce genre de partenariat n’existe-t-il pas déjà ?

Pas comme ceci, non. Cette alliance est délibérément inclusive. Tout est pensé et construit collectivement en amont, dans un tout cohérent. Quelques exemples concrets : la réunion d’une centaine de membres des corps académiques à Oslo la semaine prochaine pour concevoir des programmes, le rassemblement des étudiants des différentes universités prévu ici à Bruxelles, ou encore l’organisation de cours communs sur les grands enjeux sociétaux pour des étudiants qui émanent de différentes disciplines et de différents lieux. Avec leur carte d’étudiant "Circle U.", les étudiants ont accès à toute l’offre, les infrastructures sportives et culturelles, etc., de chacune des universités. Ils font partie d’un ensemble présent à la fois chez nous, à Berlin (Allemagne), à Paris (France), à Londres (Angleterre), à Oslo (Norvège), à Belgrade (Serbie) et à Aarhus (Danemark).

Est-il devenu obligatoire de se rassembler pour les universités ?

Ensemble, on est plus forts. Cela nous permet aussi de prendre notre juste part des financements européens par exemple. Certaines choses ne sont accessibles qu’à partir d’une certaine taille. Et je suis persuadé qu’une alliance produit également des effets bénéfiques hors de l’université. C’est une opportunité pour l’environnement global : les entreprises, les villes et les régions alentour.

Pourquoi ces universités-là ?

Car nous appartenons toutes à l’association The Guild qui regroupe 18 prestigieuses universités européennes et que je préside actuellement.

Les sept universités ne sont pas soumises aux mêmes règles. Ici, le décret Paysage est fort critiqué pour le morcellement des parcours d’études qu’il induit en Fédération Wallonie-Bruxelles. N’est-ce pas un frein pour votre projet ?

Avec les autres recteurs, nous demandions que ce décret soit évalué et revu le cas échéant. Je me réjouis que cela figure dans la déclaration de politique gouvernementale car, sans compter le peu d’autonomie qu’il nous laisse, on voit les drames qu’il crée pour certains étudiants qui doivent arrêter leurs études après quatre ou cinq ans. On constate aussi une tendance à l’allongement des études et on déplore une énorme surcharge de travail administratif, particulièrement en cette période de rentrée.

Pourquoi ?

Parce qu’il faut proposer à chaque étudiant le programme sur mesure qui correspond à ses attentes, ce qui représente pas moins de 32 000 programmes ! C’est très lourd pour les équipes. Or le bien-être des membres du personnel figure parmi mes priorités. Et tout est dans tout. Qui dit moins de financement dit encore moins de personnes pour assurer une charge de travail toujours plus lourde.

On sait combien vous insistez pour obtenir un refinancement du supérieur qui permette au moins de retrouver l’enveloppe par étudiant d’il y a dix ans. Dans ce contexte, l’allongement des études dont vous parlez représente un surcoût bien inutile, non ?

Bien sûr. Imaginons que les étudiants font leur parcours en cinq ans et demi au lieu de cinq ans. C’est 10 % de plus. Qui demandent donc 10 % d’assistants en plus, de places supplémentaires dans les auditoires, etc. Cela pèse énormément.

Vous avez, vous aussi, votre nouveau gouvernement. Vous entamez, cette année, votre second mandat. Dans votre équipe rectorale figure, pour la première fois, une vice-rectrice Transition et Société. Pourquoi ?

Avec la vice-rectrice Transition et Société, Marthe Nyssens, c’est la première fois en Belgique francophone qu’un vice-recteur a cette orientation-là au cœur de sa mission. L’heure est venue de nous engager dans une véritable transformation écologique et sociétale. Cette dimension sera inscrite de façon transversale dans tout ce qui touche l’université (l’enseignement mais aussi la recherche et l’institution), dans le cadre d’un vaste plan "Horizon 600". Ce plan stratégique sur cinq ans nous mènera à 2025, l’année du 600e anniversaire de notre université, un événement que nous fêterons conjointement avec notre sœur, la KULeuven, à partir de 2020-2021.

En attendant, qu’est-ce qui se met en place de concret dès maintenant ?

En matière d’enseignement, un cours sera consacré aux enjeux de la transition. En matière de recherche, un programme de soutien est développé au sein du FNRS dont j’assurerai la présidence à partir de la semaine prochaine, visant à trouver des solutions face aux enjeux climatiques. Quant à l’institution, elle souhaite développer des campus en transition sur les volets énergie, mobilité, alimentation, investissements durables. L’UCLouvain a été novatrice lorsqu’elle est venue avec un campus entièrement piétonnier il y a 50 ans. Nous allons poursuivre dans cette voie. Je peux annoncer, à moyen terme, la création de nouveaux "éco-quartiers" avec des infrastructures partagées, de la mobilité douce, la récupération d’eau de pluie, etc.

 

Pas de nouvelle grande réforme
Refinancement. Si, dans les auditoires, cette rentrée sera plutôt calme vu qu’aucune nouvelle législation n’entre en vigueur, au niveau politique, l’année qui s’ouvre devrait logiquement voir la mise en chantier des premiers éléments du nouvel accord de majorité relatifs à l’enseignement supérieur. Après les 107,5 millions d’euros de refinancement accordés sous la précédente législature, la nouvelle majorité arc-en-ciel s’est engagée à mobiliser 50 millions d’euros supplémentaires pour un secteur soumis depuis plusieurs décennies au régime dit de l’enveloppe fermée, alors que le nombre d’étudiants a progressé de 36 % en vingt ans. Si ces 50 millions d’euros donneront à coup sûr un peu d’air, on est loin des 150 millions supplémentaires réclamés pour cette nouvelle législature par les recteurs des universités francophones…

À suivre. Autre nouvelle plutôt bien accueillie par le secteur : le (nouveau) report d’un an de la réforme de la formation initiale des enseignants, qui passera à l’avenir de trois à quatre ans pour les instituteurs et régents. Ce délai supplémentaire doit notamment permettre aux établissements supérieurs de mieux préparer le nouveau cursus destiné aux futurs enseignants, et de l’adapter aux exigences du futur tronc commun. Mais il permettra aussi au nouveau gouvernement de procéder à l’évaluation de l’impact budgétaire de cette réforme votée il y a quelques mois à peine. À suivre donc.

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